« Laissez parler les petits papiers » chantait Régine (belle référence n'est-ce pas ?)
Pour ses 100 ans, Condé Nast ressort des tiroirs un siècle de photographies de mode. Artistiques et esthétiques, ces clichés sur papier glacé parlent encore à la lectrice d’aujourd’hui. Le visiteur part à la rencontre de photographes iconiques qui ont travaillé pour des magazines prestigieux comme Vogue, Vanity Fair ou Glamour. Le musée Galliera rend ainsi hommage à ces faiseurs de rêve qui captivent, émeuvent, choquent parfois, les femmes depuis les années 20.
Le Palais Galliera, musée de la Mode de Paris |
Papier imagé
Pourquoi Vogue fascine toujours autant ? La presse est en crise, certes, mais les femmes continuent d’acheter le magazine. Voulu comme le Louvre du glamour, la lectrice aime rêver devant ces clichés de mode. L’exposition propose plus de 150 tirages datant de 1918 à nos jours. Le papier n’a pas jauni, la photo n’a pas vieilli. Ces photographies semblent suspendues dans le temps. Certaines ont beau avoir 100 ans, elles n’ont pas pris une ride. Ces clichés nous racontent une histoire et nous invitent à ressentir.
Endormies dans les archives de Condé Nast, les muses Kiki, Gigi ou Lisa reprennent la pose pour le visiteur du 21 ème siècle. La lumière du flash de l’appareil photo de Man Ray, Henri Clark ou de Irving Penn a laissé place aux spots tamisés du musée. L’époque a changé, mais l’émotion reste intacte. Le trouble devant les femmes surréalistes de Cecil Beaton de 1936, figures fantomatiques droites comme des quilles. L’émerveillement devant le portrait d’Éléonore, muse d’Edward Steichen, photographiée en 1923. L’amusement devant la nature morte de Guy Bourdin, et ses fameuses têtes de veau à la langue pendante. Ces clichés touchent et émeuvent. Le papier n’a rien de glacial.
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Nature morte de Guy Bourdin, février 1955, Vogue français |
Nature morte de Cecil Beaton, 1936 |
Photographie de William Klein, 1939 |
Papier engagé
La photographie de mode interpelle car elle est révélatrice d’une époque. Des années folles aux jours sombres de la guerre, le photographe immortalise son quotidien. Garçonne, active, provocatrice, les magazines mettent en scène l’émancipation de la femme au fil des années.
D’ailleurs, Alexander Liberman, directeur artistique du Vogue américain de 1943 à 1961, disait :
« Un photographe de mode n’est pas le photographe d’une robe ; c’est le photographe d’une femme ».
« Un photographe de mode n’est pas le photographe d’une robe ; c’est le photographe d’une femme ».
À travers sept cimaises thématiques, on (re)découvre le talent d'artistes qui ont su peindre la femme dans toute sa complexité. Romantique femme-fleur des années 20, businesswoman dans les rues de New York, croqueuse d’hommes conquérante, la femme Condé Nast s’émancipe au fil des pages.
Photographie de Clifford Coffin, 1944 |
Nature morte de John Rawlings, Vogue 1943 |
Photographie de Norman Parkinson pour Glamour |
Vanessa Paradis par Mert et Marcus, Vogue France, 2008 |
Papier osé
Mais pour durer, les magazines du groupe ont osé, bousculé, voire choqué. Vogue est notamment connu pour son esthétisme érotique. Le sulfureux Terry Richardson n’hésite pas à shooter une mannequin sous stupéfiants en 2001 et à en immortaliser une autre se grattant les fesses. Le papier glacé n’a jamais été aussi bouillant sous les flash de Richardson. Corinne Day provoque également le scandale en 1993 en photographiant Kate Moss dans son intimité. Vogue devient alors un papier chiffon pour de nombreuses lectrices outrées. Mais le magazine reste en vogue.
Hannelore Knuts par Terry Richardson, 2001, Vogue France |
Photographie d'Albert Watson, Vogue USA, mai 1977 |
Kate Moss par Corinne Day, 1993 |
Papier usé ?
Papier glacé, certes, mais papier jetable surtout. En effet, il risque de disparaître au profit du numérique. D'ailleurs, l’exposition diffuse des films contemporains qui s'interrogent sur l’avenir de la photo de mode. La mannequin devient un être monstrueux déformé par les effets spéciaux ou une créature androgyne sans fard. La photographie de mode flirte avec le surréalisme et l’étrange.
Le papier glacé, bientôt expiré ? Certes, l’avenir de la presse écrite est incertain. Mais tant que les photographes continueront de faire rêver les lectrices avec leurs clichés artistiques, Condé Nast n’aura pas de souci à se faire. Ne dit-on pas que l’art ne meurt jamais ?
Glamour de juin 1942 |
Robe "Mondrian" Yves Saint Laurent, hiver 1965-1966 |
Quelques clichés du vernissage "so hype" de l'exposition avec du mannequin, du rédacteur, du créateur et... un sac à dos. Et oui, Jeremy Scott était de la partie.
Une brochette de mannequins, garantie 0% de matières grasses |
Emmanuelle Alt et la mannequin Emily DiDonato |
Le trio "Olivier" avec Oliver Rousteing, directeur artistique de Balmain, Olivier Lalanne, rédac'chef de Vogue Homme International et Olivier Saillard, directeur du musée |
Photos Vogue.fr |
Jeremy Scott en mode collégien avec son Eastpak...son Moschino pardon ! |
Et une petite visite privée en vidéo
Papier glacé. Un siècle de photographie de mode chez Condé Nast.
Jusqu'au 25 mai.
Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris
10, avenue Pierre Ier de Serbie 16ème arrondissement
À partir de 4 €
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